Pour que nous puissions percevoir et connaître un objet il faut qu'interviennent deux facultés: la sensibilité (réceptivité) et l'entendement (spontanéité). « Par la sensibilité, les objets nous sont donnés, par l'entendement ils sont pensés » (Kant, Critique de la raison pure). Il y a deux formes pures de la sensibilité: l'espace et le temps (qu'examine l'esthétique transcendantale); et quatre concepts purs de l'entendement ou catégories: quantité, qualité, relation, modalité (qu'examine la logique transcendantale). L'a priori kantien c'est les deux. Pour qu'un objet nous soit perceptible il faut nécessairement qu'il se plie aux conditions de notre sensibilité, qu'il passe par le filtre, le prisme de notre sensibilité: il faut nécessairement qu'il soit situé dans un espace et qu'il s'inscrive dans le temps. Cette nécessité Kant l'appelle a priori. Pour qu'un objet soit perceptible par l'homme il faut a priori qu'il soit spatio-temporel. A priori: qui précède et rend possible l'expérience. « Le temps est la forme pure du sens interne (par laquelle l'esprit se perçoit lui-même), l'espace est la forme pure du sens externe » (Kant, ibid.) « Le sens externe est cette propriété de notre esprit par laquelle nous nous représentons des objets comme étant hors de nous » (Kant, ibid.) Maintenant: Intuition= représentation sensorielle d'une chose (latin intueri:voir) Intuition empirique= sensation (la chose est présente) Intuition pure= représentation de l'espace ou du temps indépendamment de toute chose particulière, représentation de l'espace ou du temps apres évacuation de tout objet particulier. L'espace et le temps sont les formes a priori de l'intuition ou intuitions pures. L'espace (« champ primitif de donation », « forme d'infinité dans la représentation ») Il est la forme de l'intuition sensible telle qu'elle se réalise dans le sens externe, et intuition pure. Il est ce par quoi le sujet « est originairement en dehors de lui-même, dans une disponibilité à être affecté du dehors qui ne comporte aucune borne. » (Benoist, 1996). Sa représentation est intuition (qui relève de la sensibilité) et non concept (qui relève de l'entendement). Cet espace purement intuitif peut être distingué de l'espace géométrique (qui se découpe en lui). « L'espace est une intuition pure, soit une représentation immédiate et singulière: immédiate en ce qu'elle réfère à son objet sans intermédiaire, sans détours, singulière en ce que son objet est unique » (Fichant, 2004). (Contrairement au concept qui est une représentation universelle, etc.) La géométrie est une science qui établit les propriétés de l'espace. La condition qui la rend possible, c'est que l'espace soit lui-même une intuition pure: « pure, pour que la science de ses propriétés soit a priori et ne se fonde pas sur l'expérience, mais intuition pour que cette science procède synthétiquement à une extension nécessaire de connaissance, et ne se borne pas à un enchaînement logique de concepts. » (Fichant, 2004) « L'espace intuitif, prégéométrique, précède l'espace géométrique, qui est celui des concepts d'espace. » (Fichant, 2004) Si intervient la catégorie de quantité on obtient le quantum comme objet mesurable, comme grandeur. Si intervient la catégorie de qualité on obtient le concept de figure, (déterminée indépendamment de la mesure). Elle s'obtient par limitation de l'espace intuitif. « Ainsi c'est l'entendement qui forme le concept en introduisant dans l'uniformité de l'espace prégéométrique la distinction des propriétés dont la géométrie est la science. » (Fichant, 2004). L'espace est donc le substrat de toutes les intuitions déterminables. « De là l'obligation de recourir à l'intuition pure dans toute proposition géométrique dont la synthèse rencontre ce qui, dans l'espace, est donné avec une nécessité non conceptuelle qui précède la connaissance que nous en prenons (et c'est en ce sens qu'il y a bien une découverte effective dans le déploiement des propriétés de l'espace) ».(Fichant, 2004). La tridimensionnalité est construite par la géométrie (eucl.) et n'est donc que dérivée par rapport à l'espace comme forme pure de l'intuition. Je ne m'étends pas davantage. En ce sens on peut dire que les géométries non euclidiennes n'entament pas la validité de l'Esthétique transc., puisque l'espace est le substrat le plus primitif sur lequel fait fond toute géométrie concevable.